Revue Sources

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Le contexte des trois articles qui suivent est une discussion qui prend de l’ampleur et même un caractère polémique en Suisse alémanique. Le problème soulevé existe aussi en Suisse romande. Il se pose cependant en des termes différents. Des tensions entre la pastorale et les finances sont constatables partout du fait du «système dual» de notre Eglise. Réduire ces tensions à un affrontement clercs/laïcs, comme les positions exacerbées le reflètent en Suisse alémanique, manifeste un problème plus profond qui relève de l’ecclésiologie: celui d’une Eglise corps du Christ dont chacun devrait se reconnaître membre à part entière et par conséquent au service d’un même bien, celui de la communion et de la mission.

Notre revue se propose de clarifier ce débat helvétique. Et de le rendre compréhensible à nos voisins qui s’étonnent – avec raison – de la complexité des relations Eglise-Etat sur notre territoire national. Tout d’abord, que signifie ce «système dual» qui semble être la pierre angulaire de ces relations, mais aussi une source de malentendus et de conflits. A telle enseigne que la Conférence des évêques suisse s’est cru obligée de faire paraître en décembre 2012 un «Vade-mecum» pour établir les règles de bon fonctionnement entre l’Eglise catholique et les corporations de droit public ecclésiastique. Nous avons fait appel à un expert averti, dont il n’est pas nécessaire de rappeler les compétences: M. Philippe Gardaz, ancien juge cantonal de l’Etat de Vaud, observateur attentif de la vie ecclésial dans notre pays[1].

Nous avons ensuite donné la parole à un vicaire général d’un diocèse alémanique, Mgr. Martin Grichting. Son plaidoyer en faveur d’une séparation Eglise-Etat en Suisse reflète des difficultés précises rencontrées dans l’exercice de sa charge, très proche de celle de l’évêque. La solution radicale qu’il préconise heurtera sans doute beaucoup de catholiques suisses. Mais nous devons tenir compte de son point de vue qui, au vu de la sécularisation montante, pourrait bien être prophétique.

Enfin, nous avons voulu jeter un regard sur le statut de l’Eglise de France, proposé comme modèle en la matière par le vicaire général de Coire. Il ne sera pas inintéressant de lire dans ce contexte les propos de Philippe Verdin sur la laïcité «à la française».

Nous avons conscience que ce débat implique une approche et un discernement «charismatiques» des ministères et compétences. Leurs contours et leur exercice devraient être réglés dans un esprit de communion. Le rapport de forces cristallisé par ces discussions révèle un affaiblissement de la conscience de ce corps dont le Christ est la Tête, unique autorité à laquelle tous sont soumis. Agents pastoraux (prêtres et laïcs) et financiers participent au même service. Le système dual exige un fonctionnement commun.

Force est de constater qu’il y a un immense travail pour combler la mutuelle méconnaissance des exigences pastorales et de gestion. La raréfaction, déjà palpable et qui va aller en s’accentuant, des ressources tant financières que personnelles nous oblige à dépasser nos divergences, à reformuler nos options essentielles en vue d’une meilleure gestion commune des moyens à disposition. Raison pour laquelle il y a urgence à promouvoir une saine collaboration de toutes les énergies, dans le respect du travail et du ministère (au sens large) de chacun pour le bien des communautés et le soutien de leur témoignage évangélique. Un chemin d’écoute, d’explication voire de tensions qui peut porter du fruit à long terme, si prévaut au cœur de chacun l’esprit évangélique de synodalité et de subsidiarité promu par Vatican II et rappelé par le Pape François.

[1] Parmi ses multiples contributions en la matière, mentionnons cet article de P. Gardaz qui ne manquera pas d’intéresser nos lecteurs genevois : « Les dispositions religieuses de la constitution cantonale genevoise du 14 octobre 2012, », paru dans l’Annuaire suisse du droit ecclésial, Peter Lang, 2012.

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