Revue Sources

Guy Luisier: Une colline au Kasaï. Chronique de guerre et d’espoir, Editions Saint-Augustin, Saint-Maurice 2017, 193 p.

Le chanoine Guy Luisier, de l’Abbaye de St-Maurice en Valais, fut recteur du collège abbatial avant de devenir curé de paroisse, puis missionnaire en RDC. Précisément, au Kasaï où il accompagne la fondation d’une communauté de chanoines réguliers. Le fait qu’il partage désormais son temps entre l’Afrique et l’Europe lui permet de se vouer à des travaux d’écriture où il excelle.

Le chanoine avait déjà fait connaître sa «colline» africaine dans un ouvrage paru en 2013: «Une colline au Congo. Six mois dans la savane missionnaire du XXIème siècle». Tableau idyllique peint par un Européen, à la fois étonné et conquis par les découvertes que l’Afrique lui réserve. L’ouvrage paru trois ans plus tard est d’une autre facture. Il s’agit d’une chronique rédigée entre le 20 juin 2016 et le 17 avril 2017, période traversée par une série d’épreuves vécues par l’auteur et ses confrères congolais.

J’ai admiré la persévérance de cet homme.

J’avais déjà lu des extraits de ce journal dramatique dans divers médias romands, avant qu’ils ne fussent rassemblés dans un seul volume. Hier comme aujourd’hui, je ne puis m’empêcher de comparer la guerre civile qui enflamme le Kasaï à celle qui ravagea le Rwanda dans les années 90. L’une et l’autre, irrationnelles et abominables dans leurs effets, mettent en scène des enfants tueurs galvanisés par la drogue ou la sorcellerie, tandis que d’autres jeunes sont leurs victimes. Le fait que ces horreurs n’épargnent pas l’Eglise est aussi une similitude. Que ces drames aient été commandités par des politiciens corrompus, affamés de pouvoir, à la botte de puissances économiques internationales ou régionales, ne nous surprend pas non plus. Mais plus important que l’analyse des causes et le détail des exactions est la réflexion et le comportement du chanoine qui vécut cette guerre dans sa chair et son esprit.

J’ai admiré la persévérance de cet homme qui refuse de quitter les lieux alors que se déchaîne la tempête. Courageux mais non téméraire, il ne s’expose pas à la mort, gardant tête froide au-dessus de la mêlée et n’abandonnant jamais son humour décapant. Face aux ruines accumulées autour de lui, il veut encore rêver aux lendemains qui chantent. Je pourrais aussi évoquer sa foi robuste, sevrée de tout pieux bavardage. Ce rude et sobre évangile lui suffit pour exorciser ses peurs et celles de ses compagnons qui marchent à ses côtés ou tremblent derrière lui.

Guy Musy

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